De Delphine Serpentine
Nous n’échappons jamais à la règle immuable dont Clarissa Pinkola
Estes traite dans Femmes qui Courent avec Les Loups. Nous appartenons à un
cycle Vie-Mort-Vie. Et encore l’établir de cette façon relève d’une perception
spirituelle liée à notre chemin que nous qualifions de païen.
En cette période de descente en nous-même, nous avons à célébrer nos
Ancêtres, nos Anciens et nos disparus. Peu importe qu’ils soient partis depuis longtemps
ou non de l’autre côté du Voile. Ceci dit je crois et pense que toutes les
pertes (amoureuses, professionnelles et les échecs personnels) représentent des
deuils avec lesquels il faut composer.
Je vous propose d’aborder ensemble ce sujet afin de pouvoir affronter
ces épreuves incontournables dans l’Abred.
Les étapes du Deuil
Première recherche : mais qu’est-ce que le Deuil ? Quel est son
fonctionnement ?
Google m’offre la réponse de Wikipédia qui, ma foi, n’est pas
inintéressante puisqu’elle permet de cadrer le mécanisme psychologique lié à
une perte.
« Elisabeth Kübler-Ross a élaboré un modèle qui est très diffusé, sans
qu'il ait été cependant démontré scientifiquement. Il fait l'objet de
nombreuses transpositions et adaptations très contestées. Il s'agit d'un cycle
théorique composé de cinq étapes :
1. Choc, déni : cette courte phase du deuil survient lorsqu'on apprend
la perte. La personne refuse d'y croire. C'est une période plus ou moins
intense où les émotions semblent pratiquement absentes. La personne affectée
peut s'évanouir et peut même vomir sans en être consciente. C'est en quittant
ce court stade du deuil que la réalité de la perte s'installe.
2. Colère : phase caractérisée par un sentiment de colère face à la
perte. La culpabilité peut s'installer dans certains cas. Période de
questionnements.
3. Marchandage : phase faite de négociations, chantages...
4. Dépression : phase plus ou moins longue du processus de deuil qui
est caractérisée par une grande tristesse, des remises en question, de la détresse.
Les endeuillés dans cette phase ont parfois l'impression qu'ils ne termineront
jamais leur deuil car ils ont vécu une grande gamme d'émotions et la tristesse
est grande.
5. Acceptation : Dernière étape du deuil où l'endeuillé reprend du
mieux. La réalité de la perte est beaucoup plus comprise et acceptée. L'endeuillé
peut encore ressentir de la tristesse, mais il a retrouvé son plein
fonctionnement. Il a aussi réorganisé sa vie en fonction de la perte.
Les cinq phases ci-dessus peuvent être linéaires mais il arrive
souvent qu'un endeuillé puisse faire des retours en arrière avant de
recommencer à avancer. Une bonne façon de traverser un deuil est de comprendre
ce que l'on vit et de partager ses sentiments et émotions avec des proches ou
des gens qui vivent également un deuil. Ces étapes ne se succèdent pas
forcément.
Il ne s'agit pas d'un mécanisme inévitable. Certaines personnes
peuvent quitter un deuil et passer à l'ultime étape de liberté d'action, sans
que les sentiments qu'elles pouvaient porter puissent être considérés comme
négligeables.
Le deuil est une réaction personnelle et collective qui peut varier en
fonction des sentiments et des contextes. Cette réaction commence par le déni
et se termine par une acceptation plus ou moins libérée du sentiment d'attachement
qu'éprouvait l'endeuillé.
1. À l'annonce de sa propre mort, c'est au deuil de sa propre
existence qu'il faut faire face.
2. Confrontés à la mort d'un proche ou d'une personne aimée ou
appréciée, c'est un deuil relationnel dans lequel nous sommes entraînés.
3. Face à l'annonce ou au constat d'une rupture, le deuil relationnel
peut provoquer des états comparables à ceux de la mort d'un proche.
Dans tous les cas, pour que le processus du deuil devienne actif, la
condition est que le changement soit non-désiré. S'il s'agit d'un suicide, si
le décès est espéré, si la rupture est attendue, le deuil est
soit déjà passé, soit il n'y a pas lieu de parler de deuil, soit il viendra à retardement... »
Nous voilà donc informées sur le sujet. Avoir connaissance et conscience des étapes n’enlèvent rien à la douleur. C’est certain. ...
Le sujet est peu abordé dans le monde païen, sauf évidemment lorsque
l’événement survient et que les personnes échangent à propos des souvenirs et
de la peine.
Pourtant notre chemin, encore considéré comme atypique voire sectaire
par la plupart, présente des particularités qu’il est intéressant de remarquer.
Le Deuil dans la sphère païenne
Hors rituels, pochettes magiques, et séances de divination, qu’est-ce
que notre foi apporte comme dimension à cet événement ?
La Mort est-elle la fin ou un autre commencement ? Ainsi Patti Wigington, une païenne bien en vue sur un site anglophone, pose comme question pour introduire le sujet.
Car évidemment, la perspective dans laquelle nous plaçons cela a toute
son importance sur notre processus de deuil.
Cette perspective est une des bases qui différencie la perception
païenne de la mort de celle d’un non-païen. Bien que dans toutes religions, il
est souvent relaté une après-vie. Cependant la qualité de cet après dépend de
nos actions lors de la vie. Nous considérons notre chemin dans un cycle de naissance,
de vie, de mort et de renaissance comme une chose magique et spirituelle, sans
fin, telle la roue qui tourne.
Nous intégrons donc cette étape à une évolution sacrée, comme
l’explique Wigington.
Dans The Pagan Book of Living and Dying, Starhawk explique ainsi : «
Imaginez si nous comprenions véritablement que ce déclin est la matrice de la
fertilité ... nous pourrions voir notre propre vieillissement sans peur ni
dégoût, et célébrer la mort avec tristesse certainement, mais sans terreur.»
De nombreux païens croient en une après- vie qui peut prendre
différentes formes selon le système de croyance personnel.
Certains chemins néowiccans présentent l’après-vie comme un lieu nommé
le Pays d’Eté (Summerland) que l’auteur Scott Cunningham décrit comme un
endroit où les âmes partent vivre pour l’éternité.
Dans son livre dédié à la pratique solitaire de la Wicca, il écrit : « Ce royaume n’est ni le paradis ni l’enfer. Il est tout simplement. Une réalité non physique, moins dense que la nôtre."
Certaines traditions wiccanes la décrivent
comme un pays d’été éternel, aux prés herbus et aux douces rivières, peut- être
la Terre avant la venue de l’homme. D’autres la voient comme un royaume sans forme,
où les énergies dansent avec les plus grandes énergies, la Déesse et le Dieu sous
leurs identités célestes. Pour certains non-wiccans, particulièrement les
reconstructionnistes, ils peuvent définir le monde de l’après-vie comme le
Valhalla ou Folkvangr pour les nordisants, comme Tir na Nog pour les celtisants
ou l’Hadès – constitué de plusieurs plans selon la vie menée -pour les
hellénistes. Pour les païens qui ne se définissent pas de voie en particulier,
la notion que l’esprit et l’âme sont « quelque part » perdure, même si ils ne
savent pas nommer ce lieu.
Célébrer la mort, honorer un chemin
Alors que la population païenne prend de l’âge –et ce propos est illustré par le décès récent de Raymond Buckland, figure phare de la Wicca- il devient de plus en plus nécessaire de faire un point pour savoir comment dire au revoir à un ami païen, peu importe son chemin.
Que faire ? Quelle est la réponse appropriée ? Qu’est-ce qu’il est
possible de faire pour honorer la croyance d’une personne sans heurter la
sensibilité des amis et de la famille non païens ?
La Mort, partie intégrante du Cycle
La Mort est un événement fondamental dans la Nature, sans cela, la vie
ne serait pas. Dès la naissance, les cellules de notre corps meurent et se
renouvellent. Le corps qui meurt n’est pas le corps qui renaît. Lors de notre
croissance, nous expérimentons ainsi plusieurs morts. Encore et encore nous changeons
notre apparence, notre attitude, notre comportement comme si nous passions
d’une vie à une autre. Cette personne morte est seulement une de nos facettes
que nous avons incarnée.
Aperçus Sur l'Après-Vie
Alors que nous allons vers une meilleure compréhension de la Mort et
de la Vie, la distinction entre les deux s’amenuise. Si nous allons au-delà du
point de vue conventionnel sur la Mort, nous pourrions nous interroger sur
notre propre peur de la Mort, enracinée dans un schéma de vie dépassé. Alors
nous rechercherions une façon de percevoir la Vie et la Mort dans un ensemble.
Il existe plusieurs façons de les aborder, comme un motif cyclique incluant nécessairement
le changement.
1. La Roue de Vie : notre existence est un motif constant issu d’un
changement cyclique. La Vie change à chaque instant jusqu’à la Mort, et chaque
instant de Mort est une Renaissance.
Nous percevons les débuts et les fins mais le flux de l’existence est
sans fin.
2. Le Wavicle : la physique
quantique explique qu' au niveau subatomique il n’y a aucune distinction entre
la matière et l’énergie. Les deux possèdent les qualités des particules et vagues
(wave en anglais) donnant ainsi naissance au concept de wavicle. Nous sommes
des motifs perpétuels de l’énergie du cosmos. Ce que nous percevons comme étant
la Mort des individus est tout simplement le mouvement infini de l’Univers.
3. L’Ascension : la Vie façonne différents niveaux de conscience, mais
toutes ont un potentiel d’évolution. Les êtres humains peuvent manifester ce
potentiel à un très haut degré. Nous pourrions devenir conscients des
dimensions qui transcendent notre compréhension limitée de notre corps etde
notre esprit, et vivre une expérience différente de la Vie et de la Mort.
Beaucoup de païens voient la Mort comme un passage plutôt qu’une fin.
Un événement à célébrer qui ne doit pas faire peur ou être méprisé. Ceux qui
restent en arrière avec leur deuil, sans atteindre l’extrême désespoir souvent vécu. Cette attitude tend à désoler ou effrayer beaucoup de personnes.
Certaines cultures modernes dépense une énergie importante pour cacher ou ne
pas parler de la mort.
Les païens mourants doivent faire face à la nécessité de dire adieu à
ce monde et saluer le suivant. Le rituel peut avoir un rôle important dans ce
processus, cela peut être une étude ou une méditation contemplative des
possibilités à venir. Si nous n’avions pas de curiosité sur ce que peut advenir
après la mort, nous nous aveuglerions sur ce que de nombreuses personnes croient
sur la prochaine étape du voyage.
Explorer la Mort directement tend à produire une expérience bien plus positive
que célébrer la Mort comme une chose non naturelle et terrifiante.
Pour les amis et la famille, le processus de Mort est aussi un voyage.
Leurs devoir est de soutenir la personne mourante par tous les moyens selon ses
vœux. Ils doivent être réceptifs aux besoins de la personne en partance,
essayer de mettre en suspens leurs propres agendas. Prendre soin d’un mourant
peut être inspirant. Il y a tout un ensemble d’actions que les païens peuvent mettre
en place pour soutenir une personne mourante.
L’une d’elles serait de lire un texte sacré comme le Livre Tibétain
des Morts ou le Livre du Départ, une poésie de circonstance ou jouer un morceau
de musique apaisante. L’encens peut aussi apaiser et créer une atmosphère
calme.
Souvent les vœux des mourants arrivent durant les derniers instants. S’ils
souhaitent que la veillée soit solennelle ou festive par exemple.
Pour les païens, ce devoir sacré prend souvent une signification
particulière, spécialement pour ceux au service d’un dieu ou d’une déesse
associé à la Mort. Peu de personnes dans les cultures contemporaines
comprennent cela, aussi tentez d’être sensible à leurs ressentis sans les
laisser perturber l’événement. Lorsque la mort devient imminente, les membres
de la veillée peuvent relever des signes de changement dans le comportement du mourant,
le souhait soudain de se réconcilier avec une personne, pouvoir clôturer toutes
choses en cours, l’absence brusque de douleur, et la famille devenant agitée et
voulant se rapprocher ou s’éloigner du mourant. Un païen mourant est susceptible
de savoir lorsque la mort approche ou de voir ses messagers ou guides. La meilleure
expérience de la mort est une combinaison de joie et de chagrin.
Le travail de deuil, les premiers pas.
Quand nous prenons soin d’un mourant, nous pouvons oublier de prendre
soin de nous. Mais nous devons nous souvenir de nous doucher quotidiennement,
garder nos auras propres, dormir ou manger lorsque c’est nécessaire. Prendre
des vitamines, se bouger, recevoir un massage, une coupe de cheveux, une
manucurie...Aimez votre corps. C’est comme ça que vous guérissez.
Soigner peut débuter avant la mort de la personne. Trouvez des façons de vivre vos émotions que ce soit durant ou après la mort. Parlez à quelqu’un, écrivez sur votre ressenti, créez à partir de vos émotions. Si vous gardez les choses pour vous, vous exploserez.
Prenez vos dispositions à l’avance pour votre mort et votre
inhumation, pas seulement pour avoir une plus grande chance de voir vos
volontés respectées.
C’est une affaire nécessitant du temps, de l’argent et de l’énergie.
Si possible faites vos plans avant d’être dans une situation de mort imminente.
Pour les païens, en Europe, la difficulté majeure est de trouver des
groupes ou des organismes capables de prendre en charge et de mettre en œuvre
leurs dernières volontés. Chez nos cousins américains, il existe désormais
toute une gamme de services répondant aux attentes de nos frères et sœurs.
Cependant nous pourrions estimer qu’à partir de l’instant où le mourant fait partie d’un groupe dont les membres sont connus de la famille, les chances d’avoir les funérailles selon ses vœux augmentent. Quant à la dépouille ou aux cendres que nous laissons, il faudra faire avec la législation actuelle.
Préparer son dernier voyage nécessite aujourd’hui plus de faire une
petite liste.
En voici une qui peut servir de base :
1- Mettez au clair vos souhaits. Souhaitez-vous suivre une tradition
familiale ? Voulez-vous une prêtresse ou un prêtre de votre religion lors de
votre veillée et de vos funérailles ? Quelle musique, quelles chansons souhaitez-vous
? Souhaitez-vous être nu ou habillé pour votre dernier voyage ? Que faire de
votre dépouille ? Comment souhaitez-vous que vos biens soient répartis ?
2- Considérez ce que vos proches aimeraient aussi. Seront-ils à l’aise
avec des funérailles païennes ? Vos frères et sœurs païens seront-ils à l’aise
avec des funérailles chrétiennes ou plus œcuméniques ? Est-ce que certaines
personnes de votre entourage proche et lointain se sentiront délaissés si vous
optez pour une cérémonie privée ? Comment pouvez-vous combler leurs attentes
sur leurs besoins de rapprochement et de mémoire ?
3- Quelles personnes aimeriez-vous avoir à vos côtés lors de vos
derniers instants ? Souhaitez-vous des fleurs à vos funérailles et sur votre
tombe ? Souhaitez-vous prendre quelques arrangements avec vos proches pour
laisser des offrandes à vos défunts et se souvenir de vous ?
4- Informez-vous sur les aspects légaux et pratiques de vos vœux.
5- Procédez à une recherche sur ce qui s’est fait déjà pour d’autres
païens passés de l’autre côté du Voile. Des idées et des contacts peuvent être
dénichés.
6- Puis posez formellement votre plan par écrit. Contactez un notaire,
si cela est nécessaire, pour entreposer et assurer la bonne exécution de vos
dernières volontés.
Mourir n’est donc pas de tout repos donc. Assurons-nous de nous
épargner des tâches d’autant plus pénibles pour nos proches et nous-même si notre
fin de vie est difficile.
Cela laissera plus de temps pour partager sur les choses essentielles.
Sources : Death: From a Pagan
Perspectivehttp://starfirescircle.com/death.html ; Patti Wigington, ThoughtCo.com
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